Après deux années exceptionnelles, le prix du bois se normalise en 2023
Comme chaque année, la Société Forestière, l’ASFFOR et les Experts Forestiers de France (EFF) publient l’indicateur des ventes de bois en forêt privée. Comprenant un indice général et des indices représentatifs des principales essences, cet indicateur permet de mettre en perspective les évolutions constatées depuis sa première publication, en 2013.
Impacté par un contexte économique difficile, le volume de bois mis sur le marché en 2023 est en baisse et rejoint les planchers des dix dernières années, après deux années de forte hausse. Le prix moyen des ventes de bois sur pied toutes essences confondues s’établit à 84 €/m3, soit une baisse de 10 % par rapport à 2022 (94 €/m3). Il reste tout de même supérieur au niveau de prix constaté en 2021 s’inscrivant ainsi dans une tendance haussière, si on excepte la progression exceptionnelle enregistrée en 2022.
Gilles Cardot, Directeur des Clients et de la Gestion Patrimoniale décrypte les principales tendances observées l’année écoulée.
1. Quels sont les différents facteurs qui expliquent la baisse relative du cours du bois ?
Les facteurs sont multiples. En premier lieu, la conjoncture économique, et notamment les taux d’intérêt élevés, ont pesé sur l’investissement des entreprises comme des ménages. Le marché de la construction et de la rénovation, principal consommateur de bois (charpentes, parquet, panneau, meubles…) s’est dégradé tout au long de l’année avec des autorisations de construction en baisse de près de 25 %. L’inflation est demeurée élevée en 2023, impactant directement la consommation.
Par ailleurs, l‘économie nationale comme internationale a tourné au ralenti, ce qui a modéré les flux logistiques, forts consommateurs de palettes et de bois d’emballage. La contraction de la demande à l’export a pesé sur le marché intérieur, participant à la baisse de la pression sur les prix.
Néanmoins, le marché de l’énergie est resté tendu, avec une demande élevée de bois énergie et des produits connexes comme les déchets de scierie dont les prix se sont maintenus.
2. Comment a évolué le marché du bois ces dernières années et pourquoi ?
Ressource renouvelable et essentielle à la séquestration du carbone, le bois est reconnu comme le matériau de la transition écologique. Différentes réglementations, comme la RE2020, promeuvent son usage notamment dans le domaine de la construction.
Cela explique la tendance que l’on peut constater sur le graphique ci-dessous : le prix moyen du bois a progressé régulièrement depuis 20 ans et a plus que doublé depuis 2004. L’année 2023 correspond plus à un réajustement (-10 %) à la suite des hausses exceptionnelles de 2021 (+34 %) et 2022 (+17 %).
3. Comment s’expliquent les grandes différences observées entre les différentes essences ?
Chaque essence possède ses qualités technologiques propres, ses segments de marché, et est plus ou moins facile à usiner. Il existe également des disparités régionales du fait de l’implantation et du dynamisme d’un tissu d’entreprises capables de transformer les différentes essences.
L’importance des volumes mis sur le marché par les propriétaires représentent aussi une composante des prix. Par exemple, les volumes de chêne de qualité proposés à la vente sont en baisse depuis 25 ans. Cette baisse de la ressource mise à disposition entretient une concurrence entre les scieurs, qui se ressent sur les prix de vente des bois.
A l’inverse, les dépérissements liés aux attaques de scolytes ont entrainé depuis quelques années des afflux d’épicéa commun et de sapin pectiné, un engorgement du marché et donc une baisse des prix.
Les difficultés rencontrées sur le marché de la construction, du bricolage, de l'emballage ou du transport de marchandise ont un impact négatif plus important sur les résineux que les feuillus.
4. Quelles sont les perspectives d’évolution pour les prochaines années ?
Il reste encore beaucoup d’incertitudes économiques pour l’année 2024 mais les premières ventes de bois organisées par la Société Forestière laissent entrevoir un début de reprise de marché pour de nombreuses essences.
Disposer d’une ressource bois locale et issue d’une gestion responsable sera indispensable au respect de nos engagements climatiques au niveau national. Nous sommes confiants sur la capacité du marché à reconnaitre les qualités et l’attractivité du matériau bois pour répondre aux besoins actuels et futurs de la société. A moyen et long terme, la tendance d’augmentation des prix devrait se prolonger.